10 mars 2008

La productivité du savoir théorique

"Teorie del cinema (1945-1990) /Les Théories du cinéma depuis 1945" Francesco Casetti (1993) :
"Ce livre se réfère à une idée de la théorie du cinéma aussi éloignée de l'abstraction (celle de ceux qui voudraient que cette théorie soit ce qu'elle n'a jamais été) que de la complaisance (celle de ceux qui en trouvent des traces dans tout discours intelligent). L'épistémologie contemporaine, dans ses efforts de redéfinition du concept de "théorie scientifique", nous aide à éviter ce double écueil. La "théorie" n'est plus uniquement envisagée comme un dispositif formel, fondé sur un nombre restreint de postulats, dans un cadre conceptuel bien défini, et avec des modalités rigoureuses d'acceptation des contenus empiriques (Nagel). Elle est plutôt pensée comme une conjecture qui permet de saisir la signification ou le fonctionnement de certains phénomènes (Popper), ou mieux encore comme une façon de voir partagée par une communauté de scientifiques et considérée efficace (Kuhn). Une théorie ne doit donc pas être nécessairement une construction axiomatique, elle doit cependant être au moins un savoir partagé au moyen duquel on tente d'expliquer le monde. (...) Une théorie est, au premier degré, la réunion d'une opinion, d'une croyance et d'un vocabulaire, permettant d'observer et de parler du réel. (...)

Suivant cette logique, nous caractériserons donc une théorie (du cinéma) comme un ensemble de thèses, plus ou moins organisé, plus ou moins explicite, plus ou moins contraignant, qui sert de référence à un groupe de chercheurs pour comprendre et expliquer en quoi consiste le phénomène en question."
Différent aspects de la théorie du cinéma :
  • - l'indication de principe et l'illustration probante : "le cinéma est... "
  • - la prise de position et le vœux pieux : "le cinéma devrait être... "
  • - L'hypothèse de tendance et la défense d'école : "le cinéma ne peut être que... "
  • - L'analyse globale et l'exploration systématique : "le cinéma semble être... "
  • - la lecture personnelle et l'analyse méticuleuse : "le cinéma dit être... "
  • etc
"Ce qui donne de la profondeur à ces discours, ce n'est pas toutefois telle ou telle forme qu'ils peuvent prendre, mais leur capacité à exprimer une hypothèse dotée d'une certaine cohérence, son évidence, sa nécessité, et surtout qui soit partagée ou puisse l'être par un groupe de chercheurs. (...)
Une thèse acquiert une dimension théorique si elle sert à la fois de point de rencontre et de motif de discussion. (...)
Les théories poétiques particulières, celles dans lesquelles un auteur théorise sa propre oeuvre, ne seront plus étudiées, sauf si elles proposent une image du cinéma qui s'étend au-delà de son objet de départ et dans laquelle d'autres peuvent se reconnaître, ou à partir de laquelle d'autres peuvent établir un programme de recherche (Bresson et Tarkovsky sont des cas controversés non résolus)"
(...)

"L'Histoire du cinéma n'est plus uniquement une histoire des films, évalués selon leur esthétique, confrontés au monde de leur auteur et reliés à leur contexte culturel. L'histoire du cinéma aujourd'hui est confrontée à un triple objet : la "machine industrielle qui régit la production et la distribution des films, la "machine" psychologique qui régit leur compréhension et leur consommation et la "machine" discursive qui régit leur mise en évidence et leur valorisation (Metz, 1977). (...)
La théorie est aussi un savoir social."

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