30 juin 2010

Gaston Bachelard, le dormeur éveillé (France Culture)

« Une philosophie du repos n’est pas une philosophie de tout repos. »
Gaston Bachelard
Les Nouveaux Chemins de la Connaissance, émissions radio (France Culture) de Raphaël Enthoven.
Série d'émissions sur Gaston Bachelard (podcasts téléchargeable pendant 1 semaine) :
  1. vie et œuvre, 28 Juin 2010 [MP3] 59'
    Jean-Philippe Pierron, professeur de philosophie - Lyon III
  2. Bachelard scientifique, 29 Juin 2010 [MP3] 59'
    Pascal Nouvel, biologiste et philosophe, Université Paul Valéry, Montpellier
  3. Bachelard musicien, 30 Juin 2010 [MP3] 59'
    Marie-Pierre Lassus, maître de conférence en musicologie à l'Université Lille 3
  4. L'épistémologie bachelardienne, 1er juillet 2010 - 59'
    Didier Gil, professeur de philosophie en hypokhâgne, chercheur associé au Centre de recherche sur l’histoire des système de pensée moderne (Université Paris I)
  5. L'imagination, 2 juillet 2010 [MP3] 59'
    Cynthia Fleury, philosophe, chercheur à l'Institut des Sciences de la communication et professeur à l'American University of Paris.

Socrate était aussi sage-femme, Leibniz était mathématicien, Rousseau faisait de la musique et Kant de la géographie… Bachelard, lui, après avoir été dix ans surnuméraire, puis commis, à l’administration des postes, choisit d’être un philosophe-poète, que les rêves ne séduisent pas moins que la raison pure, et pour qui l’erreur n’est pas un néant : « Toute ignorance est un tissu d’erreurs positives, tenaces, solidaires, (…) les ténèbres spirituelles ont une structure ».
Contre les « chevaliers de la table rase » qui, après Descartes, congédient le songe au profit de la seule connaissance claire et distincte, Gaston Bachelard cherche obstinément à comprendre la fondation imaginaire de toute réalité… Pour l’anti-cartésien généreux, l’eau, l’instant, l’espace, la poésie et le feu n’ont pas moins d’intérêt que la mécanique ondulatoire, le rationalisme appliqué, ou la valeur inductive de la relativité, puisqu’ils en livrent en quelque sorte la préhistoire. De même que Spinoza, sans en être dupe, ne se reprochait pas de courir après les honneurs ou la lubricité, Bachelard, convaincu que la connaissance se forme en détruisant les obstacles qu’elle a elle-même institués sur son chemin, examine avec douceur les divagations dont il faudrait se défaire pour accéder à un savoir certain.
Le philosophe se fait autant l’adversaire bienveillant de ceux qui regardent le monde tel qu’ils sont,- et cèdent à une conception naïve et magique du réel - que de ceux qui font abstraction de leurs émotions comme du monde sensible, pour en saisir la vérité parfaite. Loin de s’installer dans une opposition confortable entre la science et la poésie, Bachelard prend le risque de «les unir comme deux contraires bien faits ». Pour bien connaître la nature, il faut l’avoir admirée. C’est alors, estime-t-il, qu’on peut avoir la patience d’en découvrir les secrets. Aucune erreur ne mérite l’anathème, l’illusion est plutôt de penser qu’il faut se passer d’illusions pour commencer à penser. « Ah ! regrette-t-il, comme les philosophes s’instruiraient, s’ils consentaient à lire les poètes ! »
Mélange singulier de Freud, de Bergson, de Mallarmé, de Baudelaire et de Novalis, l’esprit de Bachelard est le théâtre du combat paisible que se livrent le savoir et l’extase poétique, l’imagination et l’entendement, la connaissance objective et la connaissance intuitive. Entre le songe illucide et l’abstraction rationnelle, entre l’inconscient opaque et la sur-conscience diaphane, il y a la rêverie, ce juste milieu du savoir humain, qui menace, à chaque instant, de s’évaporer en rêve, ou de se condenser en savoir objectif, mais qui révèle à la fois le monde tel qu’on l’imagine et les mécanismes qui nous font l’imaginer ainsi. Ce qui entrave la connaissance est aussi ce qui la rend possible. Le rêveur, que Bachelard appelle « dormeur éveillé » devient ainsi la figure, par excellence, de l’homme total, diurne et nocturne à la fois, celui par qui la science trouve peut-être le chemin des cœurs.
Le rêveur, c’est le grand vigilant.

Recommendations:
  • "Causeries (1884-1962)" Gaston Bachelard, Paris, Radio France, « Les grandes heures INA-Radio France » (2008)
  • "Cahiers Gaston Bachelard", Collectif, Centre Gaston Bachelard de recherches sur l'imaginaire et la rationalité (2000)
  • "Bachelard : Un rationaliste romantique", Pascal Nouvel, Jean Libis (2002)
  • "Gaston Bachelard musicien : une philosophie des silences et des timbres", Marie-Pierre Lassus (2010)

2 commentaires:

Unknown a dit…

les documents audio ne fonctionnent plus... s'agit il de mon ordinateur?

HarryTuttle a dit…

trop tard...